Dans les profondeurs de Caer Darrow, école de la Scholomance.
Malicia scruta longuement le regard fatigué d’Ummagumma avant de reprendre :
-Donc vous n’être plus au service de Nozdormu ? Pourquoi donc délaisser une telle protection ?
-Je n’ai plus d’intérêts à le suivre, et le Dragon aurai tôt fait de percevoir ma situation réelle.
-Hmmm… peut-être, je me demande comment cet abandon est perçu...
-Qu’importe, j’avais bien précisé aux gardiens du temps que je les aiderai dans un but bien précis, et j’ai accompli mon objectif… au-delà de toute espérance.
-Pourtant vos retrouvailles avec votre mère disparue à Hyjal ne semblent pas vous avoir fait le plus grand bien.
L’instructrice souriait nerveusement, tout en examinant un ensemble de sombres parchemins soigneusement étalés sur son bureau. Ummagumma hésita :
-Je n’ai pas à vous dire ce qu’elle m’a révélé ; tout ce que vous devez savoir c’est que je ferai confiance à Kel Thuzad pour élucider et maitriser le pouvoir du Brain Damage qui a consumé ma famille.
-Hmmm… étrange que ce culte ait survécu à la victoire des mortels sur la Légion.
-« Survécu » ? il n’existe que quelques survivants dont la connaissance est aussi floue que la mienne. Qu’importe leurs intentions le problème n’est pas là, le choix du Nécromancien me semble in fine le plus réaliste, aucun magicien n’a réussi à comprendre ce que nous avons pensé être un Dieu, et bien d’autres comme une hérésie.
-Votre cœur s’est bien assombri…
-Bien malgré moi professeur…
Malicia jeta un coup d’œil au chasseur et aperçut les yeux brillants d’un félin tapi sous la grande cape. Elle continua dans un soupir :
-Et oui, les temps sont toujours durs pour nous autres simples pions, que ce soit de l’Alliance, la Horde, le Fléau, Sargeras ou des Dragons.
Un instant les deux elfes échangèrent un regard comme plein de complicité et de compréhension
-Bien, votre petite histoire intéressera surement Kel Thuzad, néanmoins… il vous faudra du temps pour gagner la « confiance » du fléau.
-Sous le commandement des Naaru, les mortels ont contré Illidan en Draenor, ils feront bientôt de même pour le Roi-Liche. Mon aide vous sera des plus précieuses.
-En effet, nous comptons sur vous pour brouiller leurs activités et semer le doute entre eux, il ne faut pas qu’ils atteignent déjà le continent de Northren.
-Bien…, euh je ne dois pas tarder, ma sœur Meddle se doute déjà de quelque chose.
A ces mots l’instructrice se dirigea vers sa bibliothèque et en sorti un grimoire bleu sombre qu’elle tendit à Ummagumma.
-Tenez, prenez ceci, vous y trouverez peut être quelques éléments concernant le Brain Damage… en attendant c’est tout ce que je puis faire pour vous.
-Je vous remercie, je vais retourner à Quel Danas et je vous tiendrai au courant de la progression des opérations.
Malicia sortit du bureau pour s’assurer que personne n’écoutait, puis se rapprocha du chasseur en lui chuchotant :
-Le double jeu est bien la plus périlleuse des entreprises, je vous souhaite sincèrement bonne chance.
Un temps égaré par la voix sensuelle et la douce mais glaciale aura de l’elfe, Ummagumma salua et sortit d’un pas ferme.
-Ah une dernière chose !
-…
-Tant que vous êtes en Draenor, tuez Illidan dans son repère, ça fera un excellent début.
Sur ces mots le chasseur quitta le grand hall du proviseur, et se fraya un chemin dans l’école, sans prêter attention aux gardes squelettes et autres passionnants nécromages qui l’observaient.
En arrivant à l’air libre, il devina le soleil qui pointait à travers la brume des Maleterres. Il s’appuya contre le donjon avant que son esprit ne soit pris d’une violente anarchie, et s’évanouit.
A son réveil la journée était déjà bien avancée, et il s’empressa de grimper sur son tigre et foncer vers le Nord.
There is no darkside of the moon, matter of fact it’s all dark./////////////
Pâle matinée d’automne sur Kalimdor. A la limite de la forêt d’Ashenvale, une elfe en armure engage son sabre de nuit avec hésitation sur le pont enjambant le torrent sinueux marquant la frontière avec Azshara, région perdue dans une légende millénaire de la grande civilisation des biens nés.
Elle avance lentement sur la petite route, à peine éveillée par un léger vent qui berce les feuilles rouges des bois somnoleux. Le ciel est clair, le soleil trône fragilement au dessus de la grande mer, faisant scintiller de ses maigres rayons les crêtes argentées du Berceau de l’hiver au Nord.
Elle saisit les brides des lamentations mélodieuses de quelques âmes antiques qui hantent les ruines adjacentes. Elle est inquiète sans être effrayée, intriguée sans paniquer, fascinée par la mysticité du lieu hors du temps qu’elle ose troubler par sa misérable présence.
Azshara était belle, nostalgique, calme.
Un peu plus loin le chemin s’encastre entre deux falaises, débouchant sur une formidable cité abandonnée sur la côte revenue à l’état sauvage. La plupart des maisons sont entièrement effondrées, seuls subsistent ça et là des colonnes, des pans de murs sculptés recouverts d’herbes folles.
Elle se fraie un chemin à travers l’étonnant labyrinthe, avant d’atteindre le grand bâtiment central encore debout. Cette fois-ci sans hésiter elle arrive devant la majestueuse entrée, dont l’état de délabrement ne sera jamais suffisant pour cacher le talent artistique et technique des anciens bâtisseurs.
Résolue, elle saute sur le parvis, et d’un pied léger elle s’accroche aux aspérités crées par le temps dans le grand mur. Malgré sa lourde armure elle ne tarde pas à atteindre la grande coupole au sommet. De l’autre côté face à la mer, elle reconnait la robe blanche d’Ommadawn qui plane au dessus des ruines, se dirigeant vers Ummagumma assis sur le bord du toit.
Identifiant facilement le pas léger de sa sœur, le chasseur se retourne, ils tombent dans les bras l’un dans l’autre et s’étreignent un instant
Non sans émotions, Meddle finit par prendre la parole, la première fois depuis de longs mois où la guerre avait séparé leurs chemins.
-C’est donc dans ce fichu trou que tu fais prendre l’air à ton piaf ? Je ne te comprendrai jamais vraiment.
-On y prend bien plus que l’air petite sœur, mais peut importe où nous nous trouvons je suis vraiment heureux de te revoir devant moi ! Tu dois avoir tant de choses à me dire…
Meddle raconta les quelques derniers mois qu’elle avait vécu sous la bannière d’une alliance moribonde, contenue sur l’ensemble des fronts sensibles. Meddle n’était pas une combattante d’une force remarquable, elle misait plus sur la fureur de l’adversaire exploitée à ses dépends que sur son propre corps fin et élancé. Contrairement à son frère elle ne craignait pas l’engagement direct, et n’hésitait pas à provoquer ses adversaires en duels dans lesquelles elle excellait en adresse. Elle était l’élégance même, bien que très vulnérable pour un guerrier elle se dérobait avec l’astuce de son frère lorsqu’il était nécessaire d’éviter la charge ennemie.
Ainsi elle apprenait la guerre en attendant que les recherches de son frère sur leur famille détruite n’aboutissent.
-L’Alliance prépare une expédition en Northren c’est certain ; mais l’assaut contre le roi liche ne taira pas les vieilles rancœurs. Il faudra toujours se battre Umma… que tu le veuilles ou non.
-Je sais je sais tout cela… je sais surtout que la guerre m’a plus détruit que récompensé petite sœur… trop d’entres nous s’affrontent au mépris des périls bien plus grands qui menacent les mortels ; mais vois-tu je préfère faire confiance à un cercle dépassant ces stupides clivages.
-Il est facile de dire ça pour toi Umma, tu méprises autant l’alliance que la horde dans le fond, car plus que des ennemis les elfes de la nuit t’ont trahi…
-Ces gens se battent pour des causes nobles, mais des causes perdues… dans ce conflit je n’y vois que l’intérêt de
-… de te couvrir de gloire… avoue que tu as toujours aimé te distinguer !
-Ecoute petite sœur, sache qu’au contraire je respecte profondément touts les peuples d’Azeroth… mais ce n’est pas en aimant tout le monde qu’on se fait aimer de tout le monde loin de là.
-Mais à quoi bon prendre part à cette guerre si ce n’est pas la tienne ?! As-tu massacré tant de Warsongs, de Loups-de-givres ou de réprouvés par simple plaisir ? Et pourquoi trahir des troupes de l’alliance en aidant la horde ?
-En vérité… j’essaie de rendre la guerre plus trouble encore… qu’elle se complique…
-J’imagine que ta visite aux belles professeures de la Scholomance t’a convaincu de devenir un véritable chevalier de la mort !
-…
-Umma !
Meddle avait durcit petit à petit le ton, elle en était presque hystérique à présent, fait rarissime chez cette elfe si posée.
-Voilà… en réalité seul Kel Thuzad a, selon moi, les pouvoirs pour nous purger de ce mal qui nous ronge tant et plus. Malicia m’a demandé de me faire une crédibilité en gros.
-Mais c’est la pire des traitrises que tu puisses faire ! Toi au service du Fléau !
-Ne sois pas naïve petite sœur. Je ne le suis pas dupe et Malicia l’est encore moins. Nous savons que jamais je n’irai jusqu’à me battre de mon plein gré aux côtés d’Arthas, mais comprends-tu j’ai besoin de leurs sciences et eux seuls sont capables d’en faire usage, du moins convenablement.
-Un double jeu bien dangereux umma… personne ne te pardonnera d’avoir suivi des ordres de Northren…
-Tsss… Tyrande n’a jamais pardonné à Floyd toutes les catastrophes que ses expériences ont pu engendrées… il y a bien longtemps que nous ne sommes plus considérés. Je ne me maintiens que par mes actions dans les guerres de Draenor et en Ashenvale contre les Warsong.
-Il y a des gens au courant de cette folie ?
-Très peu.
-Mère ?
-Je n’arrive plus à la revoir… même en songe… j’ai bien peur que les supérieurs de Malicia n’y soient pour quelque chose.
-Et Dominë ?
-J’ai pu récemment retourner à Silvermoon. Il y a cependant beaucoup d’agitation là-bas… m’enfin d’après mes contacts on l’aurait vue aux Tarides, mais je reste persuadé qu’elle se cache bien mieux qu’on ne le pense.
Un sourire malicieux aux lèvres, Umma pris sa sœur par la main et s’assis vers le Nord cette fois ci. Elle se blottit dans ses bras alors qu’un vent presque glacial descendait des montagnes, annonçant une journée plus rude.
-Il va faire bientôt très… très frais petite sœur… mais mon cœur bien refroidit bat toujours au souvenir de mes amours perdus, mes amitiés présentes et qui sait notre avenir plus doux.